Les médecins de l’équipe de France sont des tombes. Impossible de les approcher jusqu’à la fin de la Coupe du Monde de Football. Dr Sport a tout de même pu rencontrer le Dr Jean Genest. Ce médecin affilié à la Fédération française de football ne sera pas en Russie mais vivra une autre Coupe du monde de football, cet été : au mois d’août avec l’équipe de France U20 féminine !
À l’occasion de la Coupe du Monde de Football en Russie, il nous a ouvert les portes de son cabinet… Préparation, prise en charge, soutien. Il se confie en exclusivité. Dr Genest, vous êtes actuellement en stage avec les U20 féminines, à Aix-en-Provence.
Quand on est médecin à la Fédération française de football, on passe plus de temps sur les terrains de foot qu’à son cabinet, n’est-ce pas ? « Entre les compétitions et les stages, on part en moyenne 15 semaines par an. Je soigne et prépare les filles depuis cinq ans. Elles ont un médecin et un kiné qui les suivent à l’année et un second kiné vient en renfort pour la Coupe du Monde. Chez les garçons, c’est un médecin, quatre kinés et un ostéopathe qui se sont envolés avec eux pour la Russie. »
« Le milieu d’après-midi n’est pas un horaire idéal »
En Russie, les hommes de Didier Deschamps vont jouer en début d’après-midi.
Comment gère-t-on cela, au niveau médical ?
« Le problème de cet horaire, c’est le repas ; l’idéal est de finir de manger au moins 3 heures avant le match donc si on joue à 14 heures, il faut avoir pris le dernier repas avant 11 heures, ce qui n’est pas habituel. En plus, les joueurs ont souvent l’habitude de se reposer en début d’après-midi, ce n’est pas donc la meilleure heure et il faut un temps d’adaptation pour s’habituer à ce rythme. Pour autant, l’avantage de ces horaires est que nous avons plus de temps pour les soins et massages de récupération. »
Le médecin de l’équipe n’est pas le médecin traitant qui, lui, suit le joueur toute l’année.
Est-ce difficile de prendre une décision, quand la blessure est grave ?
« En effet, durant la saison, le joueur est suivi par le médecin du club, qui est un peu comme un médecin traitant. C’est pourquoi nous restons en contact permanent avec ce confrère. En cas de blessure grave, on essaie toujours de transférer le plus rapidement possible le joueur dans sa ville d’origine, sauf en cas d’urgence. Si l’opération ne peut vraiment pas attendre, elle est réalisée à proximité du lieu de la compétition. En tout état de cause, on prend toujours les décisions en commun, avec le médecin du club. »
Et pour les petites blessures, quel est le protocole ?
« On assure les premiers soins tant que le joueur (ou la joueuse) est avec nous. J’emmène toujours mon appareil à échographie ce qui me permet de préciser rapidement mon diagnostic et d’adapter au mieux le traitement et les options de reprise sportive. On peut prendre une décision à chaud mais dans tous les cas, encore une fois, en liaison avec le médecin du club d’origine. »
« Le bain froid est indispensable »
Quels sont les rituels entre deux matches, durant une compétition mondiale ?
« Le bain froid est indispensable. Les filles, comme les garçons, grimacent ou râlent toujours avant d’entrer dedans mais ils en connaissent les bienfaits et ne regrettent jamais ce type de séance. En revanche, avec les filles, c’est un peu plus difficile car les installations ne proposent pas toujours une cabine de cryothérapie ou un bain froid, aux abords immédiats des stades. On a appris à se débrouiller avec une piscine gonflable et des glaçons ou même une poubelle.
Le bain froid, c’est tout de suite après le match ! Le soir même, on s’attarde sur les soins urgents et on commence les massages, s’il n’est pas trop tard… Sinon, les massages et la balnéothérapie de récupération sont toujours pratiqués le lendemain de la rencontre. Le principe de récupération, c’est sommeil, bain froid, alimentation adaptée et massages. Pour la Coupe du Monde, nous prévoyons également d’équiper les filles en chaussettes de récupération qu’elles porteront après le match et le lendemain »
« Somatique et psychique »
Vous êtes médecin des filles depuis cinq ans. Les U19 sont doubles championnes d’Europe, les U20 vice-championne du monde. Le médecin y est forcément pour quelque chose…
« Non ! Nous ne sommes pas sur le terrain mais on essaie de mettre nos protégées dans les meilleures dispositions possible. Il peut nous arriver de rassurer des joueuses et, ainsi, les remettre en confiance. Au bout de trois semaines ensemble, lors d’une compétition, il arrive qu’on devienne un peu une sorte de confident. Certaines développent des douleurs psychosomatiques. Les écouter, leur parler peut suffire. L’idée est qu’elles évoluent dans un climat de bien-être et de confiance. Le médecin n’est pas uniquement là pour gérer les blessures physiques. Il y a le somatique mais le psychique joue également beaucoup ».
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